mardi 30 août 2005

Attention, je vous écoute...

«J'ai dit: "Je me suis fait poser un bateau". C'est un mélange entre "poser un lapin" et "se faire mettre en bateau"...»
Catherine Voyer-Léger

Attention, je vous écoute...

«Tout allait bien jusqu'à ce que ça aille mal.»
Simon Tanguay

Souvenir balsamique



Trace de civilisation en forêt...
(preuve que je disais vrai le 26 juillet dernier)

dimanche 28 août 2005

Six mois

texte (ici retouché!) écrit pour le collectif Coïtus Impromptus


À ces moments-là, je devenais un automate, un horizon saskatchewanais, un élève qui récite une fable trop bien apprise devant ses grands-parents à Noël. Je n’ajoutais pas d’émotions, je savais le récit capable de communiquer les siennes sans mon aide. Mais j’étais un piètre acteur, et l’histoire d'aujourd'hui particulièrement mauvaise. Il me fallait admettre que mon cabinet de médecin était parfois une scène inconfortable. En m’écoutant, madame Chartrand ne pleurait pas. Elle a seulement dit sans trop y croire qu’il devait y avoir erreur, que c’était impossible. Pour toute réponse, j’ai regardé mon pouce droit qui massait la paume de ma main gauche.

Devant ses déchirantes suppliques, j'ai menti et j'en ai un peu plus mis que ce que l'auteur avait écrit. Six mois. Je lui ai promis qu’elle verrait fondre la neige, qu'elle humerait une dernière fois les fleurs de son lilas. Après le silence, on a parlé, beaucoup de ses enfants, un peu de la vie qui lui restait, puis on s’est donné un autre rendez-vous. Avant de fermer la porte capitonnée derrière elle, livide, madame Chartrand m’a remercié pour tout le temps que je lui avais accordé. Je n’ai rien ajouté. J'ai tiré les rideaux. Dehors, c’était déjà novembre.

vendredi 26 août 2005

Langue de bois = écharde dans le cul

Vous enviez la langue de John Charest? Allez, je vous donne les moyens d'en faire de même! Gratos!

Mode d'emploi:
Il suffit de prendre successivement, au hasard, un bout de phrase du bloc 1, puis un du bloc 2, puis un du 3 et un du 4. Prononcez avec conviction. Vous recommencez le manège autant de fois que nécessaire (ou jusqu'à ce que vos auditeurs s'endorment).

Bloc 1
-Mesdames, messieurs, Québécoises, Québécois
-N'oublions pas toutefois que
-De cette façon
-La pratique quotidienne prouve que
-Nul besoin de souligner l'importance de ces problèmes car
-Le souci de l'organisation alimenté par

Bloc 2
-la réalisation des programmes que nous avons adoptés
-l'accroissement constant de la qualité et du nombre de nos activités
-la structure actuelle de notre organisation
-notre souci constant d'information et de transparence
-le renforcement et l'extension de nos structures
-la consultation de large groupe de réflexion
-le lancement d'une campagne longuement mûrie

Bloc 3
-nous oblige à analyser
-joue un rôle important pour fixer
-aide dans une large mesure à instaurer
-constitue une tentative intéressante pour tester
-inaugure un processus destiné a perfectionner
-nous incite à préparer et à forger
-contribue de manière significative à établir

Bloc 4
-les conditions administratives et financières optimales.
-les axes d'un développement futur.
-les fondements d'un système de participation générale.
-de nouvelles propositions claires et constructives.
-un système de formation mieux adapté à vos besoins.
-un modèle de développement original.
-les conditions favorables au développement de nos activités.

Terminez le tout avec un "Merci!" bien senti et partez d'un pas décidé dans un corridor mal éclairé accompagné d'une jeune femme en tailleur qui tient des cartables. Je vous jure, ça en jette.

Allez, bon discours!

(Adaptation bien perso d'un article de C.Péraldi, L'Entreprise, no 118, 1995)

jeudi 25 août 2005

A mon grand déprimant

Lent retour au travail. Allo! Pis? T'as passé un bel été? T'as vu, ils ont refait les planchers? T'aurais pas maigri, toi (ou un autre mensonge au choix)? Et bla bla bla j'ai pas fait tout ceci, pis mon chat a fait cela, pis mon fils a gagné ci, pis mon couple a perdu ça,... Vous connaissez le topo. Tout le monde il est fin, tout le monde il est gentil bicoz reposé, bicoz encore du soleil plein les dents, bicoz obligé sinon ce serait toujours la bande de gazon partout.

Après deux jours de ce régime, je réussis à fermer ma porte de bureau et je me replie sur deux sessions de travaux qu'il me faut garder un an, au cas où. En plus de dix ans de prêchage, deux étudiants sont venus chercher leur travail d'une session précédente. Le premier est venu après que, par mégarde, le concierge eut pris tous les travaux pour le recyclage. Il faut dire que comme je n'avais pas de boîte sous la main, j'avais eu la brillante idée de classer les travaux de cette session dans un bac à recyclage... Menfin. Le deuxième, trois ans plus tard, m'avait un peu surpris par sa demande, alors je lui avais dit de revenir le lendemain, le temps que je fouille dans les catacombes. Il n'est jamais revenu. Mais je persiste à garder les travaux un an, des fois que.

Tout ça pour dire que dans mon grand ménage automnal, je suis tombé sur deux phrases d'étudiants que j'avais gardées parce qu'elles sont drôlement jolies:

«A son grand déprimant, Charles doit souvent utiliser les transports en commun.»

«Une étoile braillante apparaît dans le ciel.»

Ainsi, au déprimant de l'humanité, le soleil devrait arrêter de brailler dans quelques milliards d'années.

**

Parlant de mes cours, je cherche un court recueil de nouvelles pour mes étudiants. Des suggestions?

lundi 22 août 2005

Tire la chevillette et la bobinette cherra.

Les danseuses hawaïennes portent des jupes de paille, les danseuses tunisiennes se vêtent de moult médaillons dorés et de tissus transparents, les japonaises sont nues, tandis que les irlandaises portent des soutien-gorges en paillettes aux couleurs des USA et dansent sur Broadway. Chaque culture son costume. Pour leur part, les danseuses Khmers sont vêtues de costumes cousus alors qu'elles les portent. Pas de boutons, pas de fermeture éclair, pas de bande velcro. Une seconde peau. Pourtant on peut les enlever sans les déchirer; il suffit de trouver un fil particulier, unique, sur lequel on tire et hop, le costume tombe.

Je ne peux m'empêcher d'admirer cette culture qui a su, dans une jolie poésie, allier art et sac de nourriture pour chiens.

Mais il vous faut avouer, gentes dames, qu'un costume de ce genre équipé d'une languette rouge à la Vache qui rit lasserait les plus éméchés et autres malhabiles, et éviterait ainsi bien des déceptions!

jeudi 18 août 2005

Madeleine

Texte écrit pour le colectivo Coïtus Impromptus

Ce matin, Madeleine s’est enchaînée à la tuyauterie du sous-sol pour ensuite avaler la clé. À la grosseur de la chaîne, ils devraient couper le tuyau au chalumeau. Ils, c’étaient les soldats de son pays, ceux qui jusqu’ici étaient des alliés, des amis, des frères. Ces traîtres viendraient ce soir ou demain l’expulser de sa maison comme on arrache un enfant en pleurs au cadavre de sa mère. Partout dans les journaux, on parlait d’évacuation, terme qu’on réserve habituellement aux eaux usées et aux victimes d’une tempête, d’une inondation, d’une soudaine crue. Sauf que cette crue était celle du bon sens, et que c’était un peuple qui inondait.

Madeleine ne comprenait rien. Comment pouvait-on passer de victime à bourreau en vivant simplement dans une maison? C’était Ariel lui-même qui lui en avait donné les clés. Et Ismaël, l’autrefois bel idéaliste Ismaël, le maintenant austère et hostile Ismaël, de lui demander en écumant où il était aujourd’hui, son Ariel? Madeleine est parvenu à l’apaiser en lui promettant qu’elle et lui seraient les derniers à partir de la colonie, ceux qui appuyeraient sur l’interrupteur.

Ce soir, les soldats sont venus, tranquilles. Ils ont parlé à Madeleine, doucement, comme on parle à une vieille tante affaiblie sur son lit d’hôpital. Madeleine pleurait alors qu’Ismaël lançait des points d’interrogation acides comme d’autres avaient jadis lancé des pierres.

Les soldats n’ont pas eu à découper les tuyaux, ils savaient où la chaîne avait sa faiblesse. Madeleine et Ismaël sont sortis debouts, dignes, déchus. Sur le pas de la porte, Madeleine s’est arrêtée pour regarder une dernière fois sa maison. Au moment de quitter les lieux pour de bon, dans un dernier sanglot, elle a appuyé sur l’interrupteur.

Et la lumière s’est allumée.

mercredi 17 août 2005

Hum...

Pourquoi il y a un verbe qui signifie «dire un mensonge» mais aucun qui signifie «dire la vérité»?

lundi 15 août 2005

Ha! Cours de blogueurs...

C'est la rentrée, lalalèreuu! Ce qui signifie qu'en plus des aubaines impossibles-au-secours-j'me-peux-plus sur les vêtements dernier cri (Haaa!) , les calculettes et les Toyota, je recommence le boulot.

Cette session, je joins l'utile à l'agréable: je donne un cours ayant pour thème «les blogues» et pour titre un jeu de mots vaseux du genre «Blogues à part» (Mal de blogue étant déjà utilisé par chose là, voyons, me rappelle plus de son nom... l'ange à la voix d'or... Ça va me revenir...)

Alors donc, je suis à la recherche de blogueurs prêts à ce que leur carnet internet soit l'objet d'un travail de la part d'un(e) étudiant(e) de niveau collégial. Tous les types de blogues sont acceptés (journal, création, poésie, etc.) et les blogueurs de partout sont les bienvenus.

Je ne demande qu'une chose: que ces blogues soient écrits principalement en français (bicoz cours de french) et que les blogueurs soient prêts à ce qu'un(e) étudiant(e) les contacte une ou deux fois par courriel au cours de la session pour obtenir quelques infos du genre Pourquoi ils bloguent? Ce qu'ils pensent des blogues? Pile ou face? et d'autres trucs du même acabit. Bien sûr, cette correspondance se fera exclusivement en français, même si quelques un(e)s de mes étudiant(e)s sont anglophones ou allophones.

Ça vous intéresse? Envoyez-moi l'adresse de votre blogue et votre adresse courriel à
d.rondeau@johnabbott.qc.ca
Une brève description de votre blogue et de vous-même (l'auteur) serait très appréciée, mais n'est pas obligatoire. Ça m'aiderait lors de la présentation des blogues en classe.

Je ne garantis pas que votre blogue sera choisi par un étudiant mais s'il l'est, je vous ferai signe!
J'espère avoir de vos nouvelles très bientôt!

samedi 13 août 2005

Renommée secondaire

Je pensais qu'il me faudrait bien un jour me trouver un pseudonyme puisque Daniel Rondeau est déjà un nom d'écrivain connu. C'était avant de voir que cette homonymie me permettrait peut-être de faire quelques sous...

La semaine dernière, j'ai reçu une lettre d'une agence française, l'agence Laforêt immobilier (avec un arbre dans le o, pour faire joli et montrer qu'ils ont de la suite dans les idées). Je l'ouvre, paré à recevoir une offre de condo à temps partagé près d'une autoroute dernier cri, ou une annonce de terrains boisés qui n'attendent que mes 50000$ pour se faire épiler au bulldozer. Que nenni. Cette gentille agence voulait s'occuper de la vente de ma résidence secondaire (celle de Daniel Rondeau) située à Saint-Georges-de-Montaigu, en Vendée, France (vous connaissez? Le petit pays d'Europe, là, où ils parlent avec un drôle d'accent, et où tout le monde piaille en même temps lors des émissions de télé...) Super! que je me dis. Seul hic au tableau: je suis aussi bon prospect à l'investissement immobilier que candidat à American Idol. Le bien le plus précieux que je possède est une table en bois style Louis-de-Funès et quatre chaises bâties du même bois d'arbre. Il me reste encore 248 paiements faciles et mensuels de 2,54$ à faire sur ma télé, c'est vous dire à quel point je suis loin d'une résidence secondaire outre-mer.

Alors que faire? Je pense sérieusement charger l'agence Laforêt, qui déjà par son erreur prouve toute l'attention qu'elle met dans ses transactions, de vendre le bien de Daniel Rondeau (donc le mien, hep!) et de déposer le fruit de la vente dans un compte aux Bahamas.
À moins que je garde ma résidence secondaire... C'est beau, la Vendée?

Dire que mes parents ont pensé m'appeler Bill Gates...

mercredi 10 août 2005

Retours

Bon, de retour. Encore une fois. Je passe mon temps à revenir. Toujours du bois, mais hyper civilisé cette fois: massage, bain tourbillon, piscine avec jets super puissants contre lesquels on peut nager pendant des heures sans avancer d'un iota (c'est ça le progrès: il va tellement vite qu'on nage comme des cons juste pour pouvoir faire du surplace!), souper soixante-douze services avec de la glace à saveur de fruits impossibles avant le met principal, plein de fourchettes, une serviette sur les genoux, des serveurs qui maîtrisent le vouvoiement sans mâcher de gomme, des clients avec un nombre impair et pluriel de mentons, et tout et tout. Grosse misère. J'ai pas roté, Dame V. était fière de moi. Pour finir la torture, aujourd'hui, deux heures de cheval. Ce qui fait que j'écrirai pas longtemps, j'ai le cul qui gémit juste à être assis et mes mains sentent l'étalon.
Mais demain, je reviendrai.

jeudi 4 août 2005

Michaëlle et les ratons

De retour! Une semaine de lac, de chevreuils qui se foutent de nous et de nos routes, de ratons laveurs qui savent ouvrir des glacières Coleman Xtreme (j’invente rien: Xtreme la glacière!), de canards qui protègent jalousement des canetons hasardeux, d’orages aussi forts que brefs (l’orage étant au camping ce que l’indigestion aux moules est aux forfaits cubains tout-inclus: possible et fort probable), de «campeurs» qui mettent la musique à fond dans leur 4X4 le temps de monter leur tente, de familles qui jugent essentiel que tous leurs membres soient en contact constant par walkies-talkies de seize kilomètres de portée, preuve que l’évolution n’épargne personne, même reculé de plusieurs kilomètres dans les bois.

Pendant notre absence, Tom Cruise a partagé ses réflexions sur la psychiatrie, et La Presse et RDI se sont fait berner lors d’une ligne ouverte par le témoignage d’une fausse victime de l’écrasement de l’avion d’Air France à Toronto. Il suffit d’une caméra, d’un micro pour devenir une source fiable. À quoi bon les chercheurs universitaires quand on a des acteurs américains? À quoi bon vérifier nos sources avant de publier un article à la une d’un grand quotidien si la source elle-même a pris la peine d’appeler en direct à la télé?

Même en politique, l’homme moderne est comme un Amérindien pré-colombien devant les reflets brillants d’un miroir: le maire de Montréal rêve des jeux olympiques de 2016, et on se pâme pour Michaëlle Jean qui deviendra gouverneure-générale. À la une partout! Youhou!? On perdra une excellente journaliste pour la transformer en représentante de la reine d’Angleterre, en symbole de notre colonisation, en porte-parole publicitaire onéreuse (elle voyagera beaucoup et pas en classe économique, la GG) de notre beau et grand et plus meilleur que toutt pays. Qui pour se révolter? J’attends, mais j’ai peur de n’entendre que l’écho de ma voix. Tout ce chemin depuis l’amibe…

Restent les chevreuils qui traversent notre route en trois petits sauts et les ratons qui ouvrent nos glacières pendant qu’on se regarde dans le miroir du colon. Être eux, je ne me gênerais pas.