samedi 4 mars 2006

Si Proches, si loin...

Supposons. Mettons. Disons que. Mettons supposons. Alors supposons que votre voisin vous invite à souper. Vous êtes un peu surpris du geste car lui et vous n’avez jamais fraternisé au-delà de la météorologie au dessus de la clôture Frost qui vous sert de frontière commune. Vous savez aussi, à cause de ces soirs d’été où le vent souffle de l’ouest, que votre voisin se mijote des recettes douteuses à la limite de la pâté pour chat. Vous acceptez tout de même l’invitation, par politesse, par curiosité, par ce civisme élémentaire qu’exige un bon voisinage. Et là, dès que vous êtes assis à sa table, votre gastronome voisin se met à réciter le bénédicité les yeux blancs ouverts regardant l’intérieur de son crâne.
Que faites-vous?

Eh bien, jeudi soir, j’ai eu à me poser une telle question.

J’étais invité (mais j’ai payé mon billet) à une soirée d’opérette dans une école secondaire (anglophone) de l’ouest de l’île (anglophone). Une représentation du Lakeshore Light Opera, troupe (anglophone) qui fête ses 51 ans d’existence cette année. (Vous ai-je dit que c’était anglo? Sinon, je précise, au cas où ça vous aurait échappé.) Je m’assois parmi des spectateurs qui parlent en grande majorité un anglais du milieu du siècle dernier et qui portent les cheveux bleus, quand il leur en reste. Je suis, je le sens, dans cette arrière-cour libérale qui serait prête à voter pour une chèvre si on la peignait rouge. J’observe avec intérêt ces descendants nostalgiques de l’empire britannique et je suis sûr que je viens de rencontrer ceux qui ont posé au mur ce cadre de la reine d’Angleterre toujours présent à la bibliothèque du cégep où je travaille (vrai de vrai, vous pouvez vérifier). Parmi ces vieux, quelques jeunes début vingtaine venus voir copines et copains pousser un petit air d’opéra léger. Je m'enfonce dans mon siège et essayant de me convaincre que je passerai une belle soirée, mais j'arrive vite à court d'arguments. Au moment où les lumières de la salle se tamisent, l’orchestre dans la fosse joue trois notes lentes et graves : pom - pooom – poooommm… La salle se lève, monobloc! Jeunes et vieux! Comme à la messe! Puis, tout le monde entame, la main sur le coeur… le Ô Canada (English version)!
Que fais-je?

Je ne sais pas s’ils ont trouvé bien insultant que je reste assis.

14 commentaires:

  1. Une chance que t'es pas venu à l'église jeudi matin, deux fois la même journée ça fait beaucoup.

    Quoi qu'à l'Église vraiment, nous sommes de plus en plus à rester assis en retrait. Étrange, parce qu'à choisir entre les deux, je pense que le 'Notre Père' m'émeut encore davantage que le 'Ô Canada'.

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  2. Ma liste d'épicerie m'émeut davantage que le "Ô Canada"...

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  3. vous aviez payé, vous serez pardonné. Parce qu'invité : on s'exécute et on n'accepte plus d'invitation

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  4. vous êtes bien bon, parce que moi, à votre place, j'aurais crissé mon camps pour ne pas lancer mon siège sur la scène...

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  5. Une chèvre? Ils évoluent quand même! Dans mon coin, c'est pour le cochon qu'ils votent...!

    Sérieusement, je crois que j'aurai fui en courant! T'es resté toute la soirée?

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  6. Le Beauf -> tu confonds: je suis allé voir des Canadiens, pas au Canadian Tire...

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  7. Vous semblez aussi surpris que moi!

    Je me suis informé: il semble que le Ô Canada soit habituel au début d'une soirée de spectacle, quel qu'il soit! En tout cas, tous les Anglos à qui j'ai demandé si c'était habituel ne comprenaient pas ma surprise tant cela est normal pour eux.

    C'est pour dire si on se connaît mal.

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  8. Ah ben moi, je ne suis pas surprise. Je comprends ton désarois, par contre. Pour les anglophones, connaître l'hymne national est super important. C'est une manière de se différencier des Américains en affirmant leur appartenance à une autre contrée. La plupart des Ontariens sont d'ailleurs sidérés que les Québécois ne connaissent pas par coeur l'hymne national. Moi j'en connais des bout, en franglais à cause du hockey, et si c'était pas de ça, je ne le saurais pas du tout.

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  9. ok.. l'hymne nationnal avant un spectable, c'est un peu fort.. mais arrêter donc de tapper sur le Canada.. on était tous fier, il n'y a pas trois semaines, du succès qu'on connu nos athètes, on chiâle pas quand on reçoit son remboursement d'impôts...

    Le patriotisme zélé pratiqué par les américains me lève le coeur, mais des fois, je me dis qu'on est pas moins pires quand on tappe sur les "west islanders"...

    Comme on dit, vivre et laisser live !

    O' Canada.. terre de nos ailleux...

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  10. Jef:
    Primo: je me fous comme t'as pas idée des médaillés canadiens, québécois et norvégiens. La fierté qu'un des "nôtres" glisse sur des planches plus vite que les autres ne m'effleure pas le moins du monde. Ça fait un beau spectacle, bien qu'un peu long. Pas plus.

    Secundo: Dans le concept du remboursement d'impôts, il y a celui de rembourser (rendre à qqun l'argent qu'il a avancé). Je vois pas pourquoi je remercierais un pays pour cela.

    Finalement, si je comprends bien, souligner le nationalisme zélé des West Islanders, c'est faire preuve d'un nationalisme tout aussi zélé?
    La rhétorique est à revoir...

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  11. Dan, je faisais surtout allusion aux commentaires un peu plus haut, je n'ai pas lu de zèle dans ton texte.. et pour être honnête, je serais probablement resté assis moi aussi.

    Ce que je voulais souligner c'est, qu'en général, je nous trouve vite pour tapper sur tout ce qui conserne le Canada et ensuite on s'étonne que les "canadiens" font de même à notre égard.

    Des fois, je me demande qui sont ceux qui cultivent réellement cette "rivalité" entre citoyens d'un même pays.

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  12. OH YEAH, UN DÉBAT CHEZ DAN!

    Primo: Y'a des gens qui à qui on ne retourne pas d'impôts mais qui en paient. Et oui je chiale, pas parce que je suis contre les impôts en général, mais parce que je trouve injustifiable de payer autant d'impôts à un palier de gouvernement qui engrange des surplus, refuse le partage des responsabilités inscrits dans sa constitution, et envoie mon argent aux forces armées.

    Secundo: Y'a pas de 'rivalité'. Où ça une rivalité? C'est pas une course, c'est des incompatibilités. La question est pas «sont-ils cons ou non?» la question c'est «partage-t-on ou non l'envie de faire un pays avec des gens si différents de nous?»

    Et la décision ne se prendra pas pour une question d'hymne national! Faut pas mélanger le symptôme et la cause du malaise!

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  13. Hé! Hé! Je savais que Catherine serait contente!

    Moi, je me retiens car dans ce genre de débat là, j'ai des tendances falardeauesques. Alors je dirai seulement que j'en ai pas mal soupé de ce pays qu'on tente de me rentrer dans la gorge (en se disant que je l'aurai un jour dans le coeur) à coups de pubs, de drapeaux obligatoires partout, d'hymne national avant une pièce de théâtre, et du respect d'un voisin qui se dit «god bless Canada», puis nous lance «speak white» (déguisé pour l'occasion en «sorry, I don't speak qwebekwaaaa» rempli d'un mépris mal dissimulé).

    On oublie trop souvent que le scandale des commandites n'est pas que des gens se soient enrichis avec un programme gouvernemental de promotion d'une idée de pays, mais bien le programme proprement dit.

    Bon, ok, je vais me coucher.

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  14. L'été je fais du vélo avec ces p'tits vieux. Ils sont impayables. Mais je les aime bien. Ils ne sont pas partis en 76, en 81, en 95. Le Québec c'est leur beau risque. J'aime qu'ils soient là, ici, avec leur patriotisme suranné. Ça me change du Plateau.

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