Je viens de passer la dernière semaine un peu à l’écart, question de retrouver ma nature propre en bonne compagnie. Avec une Dame V détendue, une petite saoule d’air des bois, des amis au rire facile et au nez dans les bouquins de vacances. Ensemble on passait nos journées à regarder les familles de canards nager devant nous, nos soupers à trinquer à la vie, nos soirées tamisées à jouer aux cartes dans un chalet plus grand que tous les appartements où j’ai habité depuis 15 ans réunis.
Sur le lac, des enfants riches tournaient en rond en monoski ou sur des tubes dignes de parcs d’attractions, tirés par des bateaux de 75 000$ qui consomment plus d’essence que le Centre Bell de bière, pendant que tranquillement, même loin d’eux, leurs vagues grugeaient la berge. Ces mêmes enfants riches qui, jumelés sous les parasols, jasaient force de moteur, valeur de propriété et revenus boursiers en scrutant l’horizon comme des visionnaires. Je ne pouvais m’empêcher de penser que selon la société qui m’entoure, ils représentent la réussite. Soupirs. Je n’appartiens pas au même monde et je vis très bien avec ce constat. Cette semaine, par mimétisme je suppose, j’ai pourtant un peu essayé; je n’ai réussi qu’à perdre mes lunettes dans le fond du lac, à blesser mon orgueil en tombant constamment de mes skis nautiques, à m’écraser le cartilage des genoux sur un trampoline extérieur et à me briser la dernière phalange du petit doigt en jonglant avec des boules de pétanque pour faire rigoler des enfants. Dans un cirque, je serais le clown avec le feu au cul.
Mais le matin du dernier jour, sur le miroir du lac aux aurores, entre deux bancs de brouillard, est passé une chaloupe. Je pouvais entendre l’effort du bois sous chaque coup de rames. Au centre de la baie aux canards devant notre chalet, le marin d’eau douce s’est arrêté pour souffler un peu, pour humer le calme, pour savourer la fraîcheur, Quand il m’a vu debout sur le quai, il m’a salué de la tête, petit coup de menton discret vers le bas, le visage épanoui de celui à qui appartient la vie pendant que les réussites refont le plein d’essence, puis il a repris son doux labeur pour disparaître dans un nuage à fleur d’eau. Dans les arbres derrière moi chantait une tourterelle triste.
Hier soir, je suis rentré à Montréal en sachant très bien qui j’étais.
Je suis une barque un matin d’été.
Et bien c'était moi dans ma chaloupe!
RépondreEffacerNon, blague. Votre texte m'a beaucoup touchée.
Ce soir, je suis à Montréal et je sais moi aussi très bien qui je suis et j'en ressens un profond plaisir
Ah Bastien tu caches tout.
RépondreEffacerVoilà mon Dan, tu es une barque un matin d'été, cucul... :o). Et c'est parfait comme ça.
euh je voulais dire bastien tu gâches tout... :$
RépondreEffacerC'est de cette façon que je vois la vie! Enfin je suis plus canot entre chien et loup! :)
RépondreEffacerC'est tout de même mieux qu'un vieux voilier vicieux! :P
RépondreEffacervirginie
bastien est de la jeunesse que le cucul n'émeut pas.
RépondreEffacerquand il sera plus vieux, qu'il aura (peut-être) lui aussi des enfants, il le deviendra lui aussi.
Humm...Bien que je ne sois pas encore de la vieillesse, je ne suis plus non plus de la jeunesse, j'ai des enfants et pourtant, avec tout ça, le cucul ne m'émeut pas plus.
RépondreEffacerCeci dit, je trouve l'image très jolie, pas nécessairement cucul.
Les autres bateaux là, faudrait vous trouver un autre lac par contre, sinon ça fera un peu trop banlieue...;-)
Je suis peut-être une barque cucul... Mais, perso, je dirais kitch.
RépondreEffacerRien de cucul là-dedans à mon avis. Au contraire.
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