mardi 23 novembre 2010

Du Salon au boudoir...


Quand je suis entré au salon du livre de Montréal, je n'ai pu m’empêcher de m’extasier : il se publie tout ÇA?! Je retrouvais foi en l’humanité: que de nourriture pour l’esprit! Puis en marchant vers le stand de Septentrion pour ma séance de dédicace, je regardais les titres offerts. Il y avait tant de marchands de rêves(!), de pensée magique, d’anges, tant de guides de nutrition selon le signe astrologique de son chien, tant de gourous s'épanchant sur les bienfaits de l’épanouissement lombaire, tant de livres de recettes de grill cheeses des vedettes de l’heure que je me suis vraiment demandé comment le monde pouvait aller si mal, guidés par autant de chefs. Arrivé au stand de mon éditeur, je n’ai pu m’empêcher de répéter, un peu déçu cette fois : il se publie tout ÇA? La place Bonaventure est un immense espace que le salon du livre de Montréal s'applique à remplir. L’humain à horreur du vide, sauf s’il se monnaye.

**

Assis derrière ma table pour une séance de dédicace, je regardais passer le défilé de visiteurs du salon. J’essayais de conserver intact l’éclat de mon sourire, mais quelque chose s’usait. Jusqu’à ce qu’une dame me dévoile son affection particulière pour mon livre, que cette autre lectrice (oui, le lecteur est habituellement une lectrice) m’avoue avoir fait plusieurs centaines de kilomètres avec mon livre pour que je le dédicace, que ce gars, qui ne savait même pas que mon livre existait cinq minutes auparavant, décide de l’acheter…

À toutes ces personnes et à toutes les autres qui sont venues me voir ou qui voulaient juste lire le 4e de couverture de mon livre au milieu de tout ÇA, merci de vous être arrêtées!

mardi 16 novembre 2010

Pas tous les jours...

Mon premier Salon du livre de Montréal arrive!
Sera-ce mon seul? Je travaillerai fort pour que ça ne soit pas le cas, mais d'un coup que, ce serait plate de se manquer!

Je sourirai aux visiteurs au stand du Septentrion (chez Dimédia, #412):


le jeudi 18, de 19h à 20h30;
le vendredi 19, de 13h à 14h30;
le samedi 20, de 18h à 19h;
le dimanche 21, de 13h à 14h.

Venez! Ce serait bien plééésant de vouzyvouère!


Et vous voir fera changement de tous ces gens qui se demandent où peut bien être ce formidââble livre sur les anges...
Au paradis du prémâché, monsieur.

mardi 9 novembre 2010

Petit matin de parents

Pas à dire: le «terrible two», ça redéfinit l'idée que vous aviez du déjeuner avec bacon.

jeudi 21 octobre 2010

Rebrousser paupières


50 mètres après la courbe que tu empruntes chaque jour depuis 10 ans, près de la ligne double, il y a un nid de poule; il te faut garder la voiture sur la droite pour ne pas avoir à te payer de nouveaux amortisseurs. Tu colles la droite avant même de sortir de la courbe, sans ralentir, sans y penser, sans attendre de voir le trou. Tant pis pour la marmotte ou l’improbable col bleu occupé à le reboucher. Tu as la tête ailleurs; les routines permettent de penser à autres choses.

Si tu avais un cheval, il te conduirait seul là où tu vas, par habitude, te laissant à toi-même, mais tu ne peux pas te fier ni sur une bête ni sur personne. Tu deviens un être de règles, laissant à la répétition le soin de souffler lentement la flamme. Ta vie ressemble à ces exercices d’anglais où tu devais écrire dix phrases une sous l’autre. Tu finissais par les écrire à la verticale : Kick, Kick, Kick… the, the, the… ball, balll, ball… Tu finis avec un résultat d’usine, droit, parfait, couleur de plomb, sans avoir la moindre idée de ce que tu as pondu. Tu survis. Tu es en mode «économie d’énergie» pour faire durer la pile plus longtemps. Mais pourquoi? Pour combien de temps? Pour en faire quoi? Tu ne comptes plus les invitations refusées, d’abord par fatigue, puis par habitude. Les étudiants n’osent plus poser de questions, les collègues, soudainement silencieux, passent devant ta porte sans s’arrêter, le téléphone ne sonne plus, sinon pour parler à Gilles. Tu ne connais pas de Gilles.

Faire la vaisselle te pèse, la télé est lourde et tu te couches en petite boule sans toucher ton amoureuse qui dort déjà depuis quelques minutes, voire des heures, des mois peut-être.

Puis il y a cet ami qui met tout son poids au bout d’une corde, qui te secoue, qui enviait peut-être la vie que tu salopes allègrement sans t’en rendre compte. C’est la main sur le vernis de son cercueil que tu ouvres les yeux, que tu t’obliges à observer la route avant de te ramasser un orignal en plein front. La vie est plus belle quand on la regarde.

vendredi 8 octobre 2010

Attention, je vous écoute...

Désirant me consoler de m'avoir infligé quelques défaites de suite au billard:
«Mais dis-toi que tu as perdu par défaite.»
Isabelle Toussaint

Merci, je me sens mieux. Menfin, disons.

mardi 28 septembre 2010

Au Salon du royaume

La dernière (et seule) fois où j'ai mis les pieds au royaume, j'étais dans les cadets de l'air, en camp d'été, à la base militaire de Bagotville. Je n'ai goûté du lac Saint-Jean que des «ration packs» datant de la guerre de Corée, je n'ai senti qu'un bout de forêt sous mes bottes noires, et je n'ai vu qu'un coin de ciel parsemé de Voodoo qu'on regardait s'envoler au couchant, au garde à vous, au son de trois trompettes qui jouaient approximativement le Ô Canada... 


Du lac (et des cadets), je suis revenu profondément antimilitariste et souverainiste, mais tout n'est pas perdu; j'ai retenu comment plier le coin des couvertures, comment «spitter» des bottes et faire un noeud de cravate en chantant des chansons idiotes.


Dans quelques jours, je retournerai dans ce coin de pays. En civil. Plus précisément, j'irai faire un tour au salon du livre du Saguenay - Lac Saint-Jean.


Je serai en entrevue à la Place des Médias vendredi à 14h30, et je serai en séance de dédicaces le vendredi 1er octobre de 19h à 20h et le samedi 2 de 13h30 à 15h.


Si l'envie de venir me faire un petit coucou vous prenait, ça me ferait plaisir!

mardi 21 septembre 2010

Aphorisme

L'homme, tout comme sa douce, vieillit, et il se console comme il le peut de cette usure qui lentement le ronge. Combien ont entendu qu'à quarante ans, on est mieux que jamais dans notre peau?
Normal. Elle est de moins en moins serrée...

jeudi 16 septembre 2010

Christophe

Tu avais le sourire narquois, léger, les yeux rieurs, moqueurs. Tu étais brillant et attentionné. Tu avais ce charme des brutes au regard doux qui nous rendait tous un peu jaloux, jusqu'à ce qu'on apprenne ce qui se cachait derrière.
On t'appelait Chris, Cricri, Totof. Je te surnommais Tof. Autour de la table de notre poker hebdomadaire, ce surnom t'allait comme un gant. Je n'aurais pas cru être si loin de la vérité dans ta vie de tous les jours.
Debout devant ton cercueil, près d'une photo de toi un peu plus grande que nature, j'aurais voulu, juste pour toi, croire en Dieu, croire en un au-delà où je pourrais un jour me rasseoir à tes côtés, le temps d'un verre et d'une partie de poker, question de te détester encore un peu, de me demander comment tu fais, vieux bougre, pour lire si bien dans le jeu des autres, pour laisser si peu d'indices sur le tien.
D'ailleurs, comment as-tu fait?
Même dans tes clins d'oeil rieurs alors que tu ramassais les mises, je ne pouvais savoir si tu m'avais bluffé. Maintenant, je sais que oui. Salaud.
Tu sais que depuis une semaine, tous les gars du «bunker» jouent leur jeu ouvert? Que grâce à toi, on s'est juré des trucs inimaginables jusqu'ici? Qu'on a pleuré dans les bras les uns les autres?
Tu t'es couché avec la meilleure main, Tof, ce qui n'arrivait jamais dans notre tripot, ce qui n'aurais jamais dû arriver. 
Je te déteste encore un peu aujourd'hui, une semaine plus tard. C'est la troisième phase du deuil, à ce qu'il paraît. Ce soir, demain, dans un an, la tristesse. Un jour, j'arriverai à l'acceptation. Ce n'est pas que j'y tienne tant que ça.
Repose-toi bien, Tof. Tu nous manqueras plus que tu ne le croyais.

mardi 31 août 2010

Vieux Mégot

J'attends l'autobus en regardant le temps passer. Près de moi, un jeune tente de tirer ce qu'il reste de nicotine d'un bout de cigarette qui ne lui dépasse pas des doigts. Ses aspirations sont vaines. D'une chiquenaude, il l'envoie au centre d'une rue qui a l'habitude de recevoir des mégots plus longs, du moins c'est ce que laisse croire l'opulence des maisons du quartier.

Une voiture ralentit à peine pour faire son arrêt obligatoire. À bord, une jolie jeune fille aux longs cheveux blonds, peut-être une de mes futures étudiantes, est assise près d'un homme que j'imagine être son père à voir la gueule qu'elle lui fait. Je me dis que l'âge de cette dernière tranche drôlement, près de ce vieux grisonnant. Je souris. Puis je soustrais l'âge de la fille du mien. La voiture a depuis longtemps disparu de mon champ de vision quand je ramène mon regard à mes pieds. Dans la rue, le mégot a cessé de fumer.

Je regarde l'heure. L'autobus n'arrive pas. J'arriverai à la maison plus tard que d'habitude ce soir.

jeudi 12 août 2010

Pluie, pluie, jolie pluie (air connu)

La routine matinale de Dame V. débute invariablement par une lecture attentive de la boule de cristal des météorologues de Météo Média. Pour une raison que j'ignore, leur manque d'acuité au delà des 12 prochaines heures me rassure. Je ne regarde donc jamais leurs prédictions, me contentant des comptes rendus que me sert ma douce par dessus le café, comptes rendus que je sale chaque fois. Alors, quand elle m'a dit, le ton en deuil, qu'ils annonçaient pluie, orage et temps frais pour notre semaine en camping en montagne, j'ai répondu «On verra bien.»
Et on a bien vu.
Orages soudains, vents frais, pluie quotidienne et nuits d'octobre nous ont accueillis les bras ouverts. Il y a quelques années, on aurait fait contre mauvaise fortune bon coeur, on aurait lu, on aurait sorti le Scrabble et le Boggle, on aurait joué à la pétanque dans nos sacs de couchage (l'aire de jeu est moins grande mais l'objectif reste le même: la boule la plus près du cochonnet marque un point…) mais c'était avant les enfants, et cette fois, le plus jeune se tient à peine debout. Alors se lever chaque matin sur un terrain boueux, près d'un lac à l'eau constamment rafraîchie par le déluge de la nuit précédente n'aidait pas à trouver les journées courtes.
Comment faire comprendre à un enfant d'un an qu'il ne peut passer une semaine à 4 pattes dans la boue? Comment lui expliquer qu'il peut jouer sur la plage mais pas dans le lac quand il fait froid? Comment lui faire comprendre qu'on ne peut mettre tout ce qu'il trouve dans sa bouche (un tamia rayé, passe encore, mais je ne suis pas spécialiste des champignons…) Comment expliquer à une fillette terrorisée par toutes (toutes!) les bêtes à 4 pattes qu'une mouffette ne passe pas son temps à pisser sur les campeurs, qu'un raton laveur ne nous grignote pas les pieds, et qu'on peut rester assis près du feu même si ces bêtes là se promènent dans le bois autour? Comment leur faire comprendre que se réveiller la nuit et de ne pas voir sa main tant il fait noir, c'est normal?
Mais bon, je grogne, je grogne, mais il a fait beau. Vers 10h, le matin du troisième jour. Ma fille et moi nous sommes précipités au lac pour louer une embarcation pour profiter des rayons sur l'onde. À ma grande surprise (lire déception!), ma fille choisit le pédalo alors qu'hier encore elle voulait le canot. Je laisse mon permis de conduire (je crois que j'ai le permis nécessaire pour les pédalos de moins de 500 kilos) au comptoir de location, je paye le prix (exorbitant) pour une heure de location (misère… une heure!), on grimpe sur le quai et… il se met à pleuvoir. On attendra 20 minutes que le nuage passe, puis on s'installe pour pédaler. Ma fille trépigne de joie puis se tait. Après 3 minutes de silence, elle me dit: «Je suis tannée…» On s'entendait, je commençais à l'être aussi.
Le froid de la nuit suivante et les nouvelles (mais identiques) prévisions météo ont eu raison du peu d'entrain qu'il nous restait, Dame V et moi. On a plié bagage.
Revenus à la maison, la vie nous a paru d'une simplicité sans nom. Depuis notre retour, les sourires sont détendus, les blagues fusent, on invite des amis à manger.
Pas à dire, les vacances, ça repose.

dimanche 8 août 2010

En attendant que je vous raconte nos beeeeeeeelles vacances en camping...

Les enfants font plusieurs jeux de mots, souvent par ignorance du mot juste, parfois à leur insu. Puis tout à coup...

Alors que son petit frère l'embête par une présence disons... importune, Romane me regarde et le décrit en riant:
«Clovis est un envahi-frère!»



Je sais, je l'ai déjà dit, c'est ma fille! J'en suis pas peu fier!

vendredi 16 juillet 2010

C'est vraiment ma fille!

Dans la cour arrière, je souffle des bulles de savon et ma fille court ses 4 ans dans tous les sens pour les crever. Elle pouffe, elle glousse, hilare, et à chaque bulle qu'elle touche, elle lui crie «Éclate!»

Puis entre deux rires, elle lance:
- Éclate de rire!

C'est MA fille!

mercredi 14 juillet 2010

Attention, je vous écoute...

Alors que nous croisons deux personnes discutant en espagnol, ma fille me demande:
«Ils parlent avec quelle voix?»

Romane, 4 ans.

dimanche 11 juillet 2010

Par le mauvais bout de la lorgnette

Il y a ce gars atteint du syndrome de Gilles de la Tourette, qui fait des bruits de gorge sans cesse, comme si toute sa vie, il digérait une énorme pizza. Entre ses éructations, il engueule une vieille femme l'accompagnant, femme qui doit être sa mère et qui en a visiblement honte. Puis il y a ce quinquagénaire qui raconte la bataille de chats qui l'a amené, bras enflé, à attendre ici. Et cet autre qui raconte à tous que sa femme l'a laissé seul avec ses 3 enfants après qu'il ait construit de ses mains leur maison de 39' de large par 45' d'épais (sic!) (Je doute qu'il n'ait jamais constaté que la prémisse à ses malheurs faisait une allusion à la Grande Guerre! Je n'ai pas osé lui demander si le cabanon mesurait 14' par 18'…) Et il y a cette famille de 12 accompagnant un des leurs - personne à part eux ne sait lequel - avec repas du resto et bonne humeur. Et cette trop jeune maman avec ce trop jeune bébé, et cette trop vieille dame, seule et confuse, et ce petit homme qui a visiblement passé sa vie à trop fumer et pour qui l'heure des comptes semblent être arrivée, et cette fille de Pinel, chevilles entravées et poignets attachés à la ceinture, entourée de deux sinistres aux bras gros comme mes cuisses. Tout ce monde, espérant avoir gagné la pôle position au triage, soupire dans l'attente au milieu d'un incessant ballet de civières, d'ambulances, de chaises roulantes, de petits sacs emplis de liquides au bout de poteaux à roulettes. Et il y a nous, avec notre plus jeune qui émerge de convulsions fiévreuses un peu paniquantes.


On a passé une nuit à l'urgence d'un hôpital à regarder l'espèce humaine par le mauvais bout de la lorgnette, une nuit à mesurer les détresses respectives, à jauger les malheurs invisibles, à se dire que finalement, pourquoi se plaint-on?...


Une nuit à flatter la tête somnolente de son fils, à l'assurer que tout ira, qu'on est là, et qu'à voir assis près de nous des parents qui accompagnent leur enfant de 22 ans, on le sera pour longtemps.

mardi 29 juin 2010

Comment ils font?

Comme d'aucuns le savent, 92% des billets écrits par les blogueurs sur la grande toile prient les lecteurs d'excuser une production famélique, comme si les blogueurs devaient quoi que ce soit à leur lectorat. Ou bedon ils tentent de trouver l'inspiration en parlant de leur manque d'inspiration. Oui, ce manque peut mener à des textes intéressants, bien que pas tous, comme en font fois les «Qu'est-ce que tu veux qu'un chanteur chante?» de Claude je-coupe-la-file et «écris-moi des mots qui sonnent; écris-moi des lignes qui swiguent comm’ du Sting (ça c'est de la rime!); qui sonnent comm’ du Jackson (houuuuuu!)» du frisé aux lunettes fumées. Voici pourquoi je préfère souvent me taire.


Mais je m'égare, car mon silence n'est pas causé par un manque d'inspiration mais bien de temps.


Pourtant je suis à la maison à temps plein depuis 2 mois, seul avec le plus jeune des héritiers (la plus vieille va à la garderie causer princesses et «paille de maine - piouuuu! piouuu, les toiles d'araignées...» et Dame V. va gagner le beurre et la croûte et la mie). Alors, pourquoi n'écris-je pas? Il n'a qu'un an après tout, ce bébé, il fait des siestes, il ne parle pas, il ne marche même pas encore…


Dès avril, je m'étais fixé comme objectif de faire le ménage d'une pièce par jour et de prendre le café avec les amis quelques fois par semaine. Puis j'ai révisé l'objectif à une pièce et un café par semaine. Puis… Aujourd'hui, je marche sur les céréales molles pieds nus sans sourciller et quand un ami appelle, j'ai trop mal au dos pour aller répondre et je préfère rester assis sur le plancher au milieu des blocs et des couches sales. Il me reste les soirées, après 20h30, quand la maison devient silencieuse. J'ouvre alors le fichier «ZeRoman» et le temps de m'y replonger, mon cerveau supplie pour une tonalité fixe.


Comment ils font tous les autres? Ceux qui écrivent des romans malgré leur progéniture? Comment ils font, tous ces Véronique-et-Louis de ce monde pour avoir une vie créative et familiale et sociale? La mienne se résume habituellement à Facebook où je lis les petites pensées de mes amis… Mais il ne faut pas que j'y passe trop de temps, car chaque fois que l'un d'eux écrit «je m'emmerde» ou «petite soirée plate à ne rien faire», j'ai des envies d'étranglement.


On me souffle que tout cela passe, que plus les enfants vieillissent, plus les parents ont d'espace. Mais je soupçonne que ce soit une promesse pour me faire tenir le coup, qu'arrivé à la rivière, il n'y ait pas de pont.


J'exagère, je rigole, vous le savez bien. La preuve est que j'ai pris le temps d'écrire ce billet.


Et ç'a ne m'aura pris que 3 jours.

jeudi 10 juin 2010

La Solution beauté

Aux premières lueurs de l'aube, j'ai descendu l'escalier extérieur pour ramasser le journal du jour. En quatre ans, le camelot n'avait lancé son quotidien sur le balcon que deux fois. Je me suis juré, une fois de plus, de lui servir une leçon de baseball, mais comme je ne lui avais jamais laissé un sou de pourboire, je m'estimais encore chanceux de recevoir un journal sec, en un morceau.


Plus par habitude que par curiosité, j'ai levé les yeux vers l'énorme panneau publicitaire planté sur le toit du commerce d'en face. Voitures, unes d'hebdomadaires, albums de Noël, crèmes exfoliantes ou pilules supposées gonfler l'homme endormi en moi s'y succèdent au rythme des modes. Chaque mois, un différent slogan prémâché commence mes journées: Just do it, Bonne semaine, Parce que je le vaux bien, Le Dur de dur, tous interchangeables. Chaque matin, je lis les mots, regarde les images sans y penser, je baille et je remonte allumer la machine à café. Chaque matin, sauf ce matin.


Une fille m'y attendait. Une fille nue, de dos, qui se cache les seins avec les mains sans trop qu'on sache pourquoi puisqu'elle faisait dos à la caméra. Elle regardait de côté, présentant son profil gauche. J'ai scruté son nez, son œil, son menton, le galbe de ses seins, la courbure de ses hanches, le sourire de ses fesses. Autant de régions connues, de pays visités, de souvenirs brûlants. Le mannequin était Ophélie.


Ophélie, qui avait fait le conservatoire, qui s'était toujours plainte de ne pas avoir de rôle, s'était donc résignée, comme tant d'autres de son métier, à la publicité. Toutes ces années de pratiques, d'études, d'auditions, de textes par cœur, de personnages à habiter, d'auteurs à saisir, de cours de danse, de chant, de maintient, de pose de voix pour finalement offrir son corps au hachoir de Photoshop et ainsi ajouter sa viande à la boucherie de la surconsommation qu'elle dénonçait depuis toujours. Tout près de son sourire, le panneau clamait «La solution beauté». J'ai eu un petit rire niais, sans conviction.


Ophélie était là, devant mes yeux humides, déshabillée, de dos, pour vanter les vertus d'un quelconque shampooing qu'elle n'avait sans doute jamais utilisé, du moins du temps de nos fréquentations.


Elle avait 27 ans, j'en avais 350.


Je devais appeler au boulot pour signaler que je prévoyais être malade.


mercredi 9 juin 2010

Besoin d'attention

Une amie arrive chez moi. Après les bisous bisous, elle dit à ma fille:

- Bonjour Romane. Est-ce que tu viens me voir?

Romane reste un instant immobile, puis après sa courte réflexion, lance:

- Non. Je préfère aller faire caca.

Et elle court à la salle de bain.

mardi 25 mai 2010

Avoir tort avec assurance

Hervé, c'est le grand-père d'une de mes ex. Un bel homme dont la stature était aussi imposante que la voix, la prestance, l'assurance. Il a élevé ses sept enfants avec le même aplomb qu'il a mené, sa carrière durant, les employés sous sa gouverne à l'usine. Ses enfants avaient tout de même gardé un amour aussi immense qu'inconditionnel pour cet homme qui, tous les soirs, leur avait chanté en faussant une berceuse qu'ils rechantaient en choeur - en faussant aux mêmes endroits - à chaque Noël, sous les grands rires du grand homme.

De ses années manufacturières, Hervé avait gardé son ton autoritaire, ses jugements sans appel et des idées franchement anti-syndicales. C'est dire si on était peu faits pour s'entendre.

Pourtant.

Dès notre premier échange, une affection fraternelle s'était installée entre nous. Je me souviens très bien du silence familial lors d'une de mes premières interventions soulignant le bien fondé de l'arrivée de la plupart des syndicats ouvriers. Tout le monde se préparait à une décapitation en règle. Hervé m'avait regardé puis après quelques secondes de silence, m'avait lancé:

- T'as pas tort.

Le lien était noué.

Il répétait avec conviction sa maxime : «Vaut mieux avoir tort avec assurance que raison avec hésitation» et la mettait en pratique souvent, ce qui en faisait sourire plus d'un.

On s'est côtoyés avec un plaisir que je crois réciproque quelques années avant que je ne fasse une visite d'au revoir. Ce soir-là, Hervé s'était bercé plus fort que d'habitude et avait gardé le silence entre nos gorgées de bière. Il avait eu la coquetterie de ne pas enlever ses verres fumés. On s'était serré les épaules avant de fermer la porte, tous les deux sans mots. Jusque-là, je n'avais jamais cru qu'un jour, je perdrais un grand-père à cause d'une peine d'amour.

Ça m'a pris des années avant de trouver le courage d'aller le revoir. Ce n'était pourtant pas faute d'en avoir envie. Puis, le boulot, les amis, l'amour, les enfants, bref, la vie m'a étourdi, mais par personnes interposées, j'ai toujours su que j'étais le bienvenue chez lui. J'espérais bêtement aller lui présenter mes enfants cet été, jusqu'à ce que j'apprenne qu'il s'est écrasé d'un coup, ce matin, tel un chêne qui cède aux vents.

Quel con suis-je.

***

Hervé, tu m'as manqué ces dix dernières années. J'aurais tant aimé te revoir une dernière fois. Je m'en veux d'avoir tant de fois remis cette visite à plus tard. Tu vois, j'ai eu tort avec assurance.

Même si tu ne me l'as jamais chantée, ce soir, seul dans mon coeur, je chante «ta» version de cette berceuse:

Ferme tes jolis yeux

car les heures sont brèves

au pays merveilleux

au beau pays des rêves.

Ferme tes jolis yeux

car tout n'est que mensonge

le bonheur n'est qu'un songe.

Ferme tes jolis yeux.

vendredi 21 mai 2010

Aphorisme

Rêver de dormir ne serait pas une sorte de mise en abyme?

lundi 17 mai 2010

Aphorisme

Je n'ai rien contre Jésus. C'est son fan club qui m'inquiète.

vendredi 14 mai 2010

Attention, je vous écoute...

Un badaud tente désespérément de me faire la conversation alors que je marche rapidement. Derrière moi, il me lance, assez fort:
- On sait pas qui va gagner entre Boston et Philadelphie, hein?
- ...
Il poursuit, un peu pour lui-même:
- C'est un des deux, c'est sûr.

jeudi 13 mai 2010

Pour en finir avec le prix des libraires 2010

Il y a quelques jours, on a connu le titre récipiendaire du prix des libraires. Dany Laferrière et son Énigme du retour ont reçu les honneurs. Amplement mérités.

Mais depuis, plusieurs voix se sont élevées pour décrier ce choix. Chaque jour, je lis et entends des horreurs :
«on doit encourager la relève» (alors que le prix vise AUSSI à récompenser des auteurs établis);
«ce prix doit être différents des autres, ou dans le même ordre d'idées : ce choix est convenu» (bonjour l'indépendance);
«les autres livres sont bons aussi mais souffrent de compétitionner avec celui de Laferrière»;
«ce livre est déjà trop récompensé»;
«pour contester, je ne le lirai pas».
J'ai même entendu un «Mais cet auteur est-il seulement vraiment Québécois?» (sans commentaire)...

Misère.

Eh oui, le Laferrière est fort. Très fort. Excellent même. C'est triste pour les autres titres en lice, mais c'est comme ça.

«Ce livre est déjà trop récompensé. Il faut penser aux autres.»

Mais quel est donc cet argument?

C'est comme dire à un coureur olympique qu'il est trop médaillé.
«Tu sais, tu es arrivé premier à cette course de 400m. Comme tu as gagné le 100m et le 200m, on va donner la médaille d'or au 2e car il n'a pas encore reçu de médaille...»

Remettre un prix littéraire n'est pas faire de la social-démocratie. D'ailleurs, le faire serait enlever de la pertinence, de la justesse et de l'indépendance de jugement au prix littéraire en question.

Dany Laferrière et son Énigme du retour ont remporté plusieurs honneurs cette année, et ils sont tous mérités. C'est triste pour les autres bons - certains excellents, même - titres en lice, mais c'est comme ça.

Et ça n'empêche personne d'aller lire les autres auteurs dont les livres étaient de la compétition (c'est d'ailleurs un peu l'idée que Venise Landry exprime ici) . Depuis le temps que je m'occupe du prix des collégiens à mon cégep, je sais qu'il est parfois très bon de lire tous les titres en lice...

vendredi 7 mai 2010

Piqué

Ma fille est à peu près propre la nuit. Mais je préfère laisser un piqué sur son lit, parce que hep! changer des draps à 3h du matin, c'est pas mon activité préférée.

- Je vais t'aider, Papa.

Elle va de son bord du lit et étend du mieux qu'elle le peut le mètre carré salvateur.

- Voilà, dis-je satisfait.

- Mais papa! Il n'y a pas de piqué sous l'oreiller!

- Pas besoin.

- Ouiiiiiiiiii!!! Je VEUX!

Quiconque a tâté de ce genre de discussion avec un enfant voit venir le cul-de-sac. Je tente alors de lui prouver par l'exemple que l'emplacement du piqué sur le lit est stratégiquement choisi et ce, après des années d'expérience:

- Couche-toi sur le lit, tu vas voir que tu n'as pas besoin de piqué sous l'oreiller.

Ma fille s'exécute. Une fois qu'elle est couchée, je lui dis:

- Tu vois! Le piqué est sous tes fesses.

Elle me regarde, visiblement peu convaincue. Alors je continue:

- Si tu fais pipi cette nuit, où le pipi va couler?

Elle me lance un regard empli d'une totale incompréhension, et avec un ton qu'on réserve habituellement à un débile léger, elle me lance, les paumes en l'air:

- B'en... Dans la toilette!?

Et toc.
Impossible de répondre «Non, tu fais pipi dans le lit» sans discréditer des années d'enseignement.

- Euh... On joue avec tes nouvelles figurines de princesses?

mardi 27 avril 2010

Un jour, je serai critique littéraire

Dans un mauvais roman d'action, on peut dire que les personnages expirent plus qu'ils n'inspirent.

vendredi 23 avril 2010

Petit cadeau en ce lendemain du jour de la Terre

Constat 1 : Depuis quelques années, on s'acharne à se débarrasser des sacs de plastique à usage unique.

Constat 2 : En même temps, on m'incite très très fort à composter mes déchets organiques et d'en faire une sorte de fumier pour engraisser mon jardin.

Alors pourquoi exige-t-on que tous emballent chaque caca de Fido dans un de ces sacs? L'air de rien, on doit emballer individuellement des millions de «petits cadeaux» par jour en Amérique...

N'y aurait-il pas d'autres solutions?

mardi 20 avril 2010

Recrue de mai

Vous connaissez La Recrue?

Voici comment ils présentent leur projet:
«Comme le dit le titre du projet, il y a une Recrue par mois. L'équipe de La Recrue du mois choisit, en collégialité, les livres qui deviennent des Recrues (...) en tentant d'exprimer la diversité des publications sur la scène littéraire québécoise. Tous les 15 du mois, les collaborateurs publient leur commentaire.»

Bref, avec J'écris parce que je chante mal, je suis la recrue de mai!

Disons que mes ongles et moi attendons le 15 mai avec impatience.

mardi 13 avril 2010

Michel Chartrand 1916-2010

Après Falardeau, Chartrand. 2010 est dure avec nous. En cette époque du patron roi, du tout pour soi et des paradis fiscaux réservés aux nantis, malgré ses nombreux travers, sa grande gueule me manquera. Beaucoup.



Merci à Anne Archet pour la citation et la photo.


«Mets un paquet de piasses dans une forêt et ça ne mènera pas la pitoune au bord du chemin. Mets un paquet de piasses dans une mine et ça ne te donnera pas de cuivre. Ce ne sont pas les propriétaires d’entreprises qui coupent les arbres, qui creusent les mines, ce sont les travailleurs. Si ce n’était pas de leurs bras et de leur sueur, on n’aurait rien! Pourtant, on continue à les traiter comme des chiens. On les fait travailler comme des damnés, puis on les renvoie quand on n’en a plus besoin. L’autre jour, à la Fondation pour l’aide aux travailleurs et travailleuses accidentés, on a examiné le cas d’un mineur qui travaille comme un forcené depuis une dizaine d’années. Les maladies qu’il a maintenant, je gage que ça dépend de lui? S’il a mal aux bras, c’est parce qu’il s’est crossé de travers, je suppose? Pis s’il a mal aux poumons, c’est parce qu’il s’est endormi après avoir baisé et qu’il n’a pas pris le temps de se couvrir? C’est écœurant les maladies industrielles, c‘est écœurant! Moi, je suis scandalisé! Je suis humilié de voir que, dans mon pays, il y a encore des gens qui se font massacrer pour ensuite être mis au chômage. C’est une totale aberration! On gueule contre les assistés sociaux, mais qu’est-ce qu’on doit penser des compagnies qui se font financer à coups de millions par le gouvernement? Ce sont eux, les assistés sociaux!»

(Entrevue accordée au Voir en avril 1991.)


Et si au moins il nous avait légué, collectivement, une seule de ses couilles...


dimanche 11 avril 2010

Attention, je vous écoute...

Une des dernières phrases qu'a prononcées Stéphane Dompierre dans sa trentaine:

«Je ne tough pas mes blondes assez longtemps pour voir mourir les chiens.»

mardi 6 avril 2010

Salon du livre de Québec

Comme j'organise les activités entourant le prix littéraire des collégiens à mon cégep, prix décerné dans le cadre du Salon international du livre de Québec, le SILQ marque mon printemps depuis quelques années déjà.

Mais cette année, mon plaisir est double: je resterai à Québec quelques heures de plus pour des séances de dédicaces. Voici mon horaire:

Le vendredi 9 avril: 15h à 16h et 20h à 21h;
le samedi 10 avril: 13h à 14h et 18h à 19h30.

Si vous passez dans le coin, venez me dire un petit bonjour!

jeudi 1 avril 2010

À la recherche du temps perdu

L'avantage, avec l'âge, c'est qu'on sait ce qu'on veut. On sait aussi, du moins habituellement, comment l'obtenir. On est efficace, précis, on ne perd plus son temps…


Jeune, on n'est pas aussi efficient. On vise B, on atteint A, parfois C. Il m'est arrivé de frôler D (et E, mais je vous en parlerai une autre fois). On est vague, un peu flou, on arrive à côté des objectifs (si on en a!), ce qui nous fait découvrir des sentiers qu'on n'aurait pas exploré, goûter des saveurs qu'on aurait pas osé se mettre en bouche. C'est comme ça qu'on pense devenir médecin et qu'on finit professeur. Ou écrivain. Ou boucher.


Il en va de même des dictionnaires électroniques intégrés aux traitements de texte. Besoin d'une définition, d'un synonyme? Clique ici, sélectionne. Bingo bonsoir, pas de tataouinage. Les dictionnaires électroniques, c'est l'équivalent de la quarantaine, c'est l'ouvrage de références adulte.


Mais j'ai tâté du dictionnaire électronique. J'en voulais un depuis longtemps. Verdict? Autant je ne m'ennuie pas de mon adolescence, autant je m'ennuie de la version papier de mes dictionnaires. Avec l'ancêtre de mon e-Bob, je cherchais un mot, j'en découvrais 10 autres, j'en avais pour vingt minutes à chaque recherche. Parfois, j'en oubliais le mot qui m'avait fait ouvrir le bouquin. Combien d'heures ai-je passées, enfant (et plus tard...), à regarder les drapeaux dans le Petit Larousse, à scruter les parties d'un bateau, à lire les pages roses?


Grâce au dictionnaire électronique, je ne perds plus mon temps. Et ça m'ennuie.

mardi 23 mars 2010

Le sexe de l'humour

Quand on dit qu'un homme a un bon sens de l'humour, on parle d'un homme drôle qui raconte de bonnes blagues.

Quand on dit qu'une femme a un bon sens de l'humour, on parle d'une femme qui rit facilement (idéalement des blagues de l'homme).

Même en humour, l'égalité des sexes n'est pas acquise.

jeudi 18 mars 2010

10e anniversaire du Yulblog

Party 10e anniversaire de Yulblog - Vendredi 19 mars 2010

Le 19 mars 2000 se rencontraient pour la première fois quelques blogueurs montréalais. Depuis 10 ans maintenant, à chaque mois, l'expérience se répète.

Lors de ces réunions, de belles rencontres se sont produites, quelques livres ont été lancés, des couples se sont formés.

Demain, les rencontres du Yulblog fêteront leur 10e anniversaire. Ça se passe à compter de 19h à la salle des Brasseurs RJ, au 5585, rue de LaRoche (tout juste au nord du parc Laurier) à Montréal.

Venez faire un tour rencontrer vos blogueurs favoris (et moi!)

À demain!

mardi 16 mars 2010

Bernard Gauthier

Ici, je n'ai pas l'habitude de commenter l'actualité. Mais en écoutant le point de presse du représentant syndical Bernard Gauthier, deux choses me sont venues à l'esprit.

1- Quand je la compare à notre syndicat collégial, l'image des syndicats qu'a dressée Denis Arcand dans Les Invasions barbares (avec Jean-Marc Parent en leader) est caricaturale. Quand je la compare au spectacle qu'a offert ce matin les syndiqués de la FTQ-construction, elle en est un pâle et trop gentil portrait...

2- Avec ses «parler à masque découvert» et ses autres métaphores, Gauthier menace sérieusement le roi Jean Perron (euh... non...., il ne menace personne, il... euh... il parle fort...)

jeudi 11 mars 2010

Tant pis pour la pub

Alors que je badaude à la librairie, ma fille de trois ans et demi s'écrie au loin:

- Papa, viens voir, c'est ton livre!

Intérieurement, je souris: Wow! Quelle bonne publicité! J'espère que ça attirera l'attention des 3 clients qui m'entourent... Mais Romane continue:

- C'est ici que tu l'as pris, hein papa?

- Euh... Non... Je... J'ai...

Et puis fuck. Tant pis pour la pub.

mercredi 10 mars 2010

Steven Spazuk

Je vous le dis d'entrée de jeu: l'homme est un ami. Un ami que je ne vois plus assez souvent. Enfants, rupture amoureuse, le vent, les vagues, la vie quoi. Mais la vie n'est pas finie.

C'est un des premiers à avoir cru en mon écriture, à me dire, il y a de cela un siècle : «C'est pour quand, le roman?» Il m'a aussi dit que si je publiais un livre, il voulait en faire la couverture, ce qu'il a fait, généreusement, par pure amitié. La couverture de J'écris parce que je chante mal est de lui. Merci, Steve. Beaucoup.

Mais Steven Spazuk est aussi un artiste remarquable. Inspiré, inspirant, jamais à court d'idées, et son énergie est communicative. Il expose à Paris, à Berlin, à Florence, et y a gagné plusieurs prix prestigieux. Vous avez peut-être même léché de ses oeuvres - du moins du temps où on léchait encore les timbres. J'ai la chance d'avoir quelques unes de ses oeuvres à la maison.

Depuis une dizaine d'années, il dessine, peint avec de la suie.



Dans cette courte vidéo diffusée sur TV5, il explique sa démarche artistique. C'est fascinant.

***

Le 8 avril prochain, jour de son anniversaire, sortira un livre sur ses oeuvres. D'ici là, ce livre est en pré-vente au prix coûtant. Je ne saurais trop le recommander.


***

Finalement, demain, jeudi 11 mars, c'est le vernissage de sa nouvelle exposition à l'hôtel Méridien Versailles, au 1808, Sherbrooke ouest, à Montréal.

Si vous avez quelques minutes, n'hésitez pas à aller y faire un tour. C'est jusqu'au 6 juin 2010.

vendredi 5 mars 2010

Buffet froid

Je passe en revue la chronique nécrologique. La liste des défunts est longue, comme à chaque jour. J'examine les photos et je trouve que tout le monde a la tête de l'emploi, comme si la photo avait été prise exprès pour l'occasion, en sachant qu'elle servirait à ce constat du carnage ordinaire.

Chaque jour, je trouve que la date de naissance de la plupart des froids se rapproche de la mienne, même qu'il n'est plus rare que ceux que l'ont voit sourire platement sur ces pages soient nés après moi. Comment est-il possible que ces vieux cons soient les mêmes enfants que je poussais dans la cour de l'école jadis, les mêmes qui chantaient des chansons idiotes sans se soucier du temps qui passe? Ainsi feu-feu-feu, les petites marionnettes...

J'ai cette terrible impression que je navigue dans une de ces barges qui s'apprêtent à accoster en Normandie, que dans quelques minutes, le flot de soldats me poussera sur la plage de Juno et que je courrai une dernière fois, essayant de respirer le plus longtemps possible entre les gouttes de plomb, entre les balles de mes souvenirs. Je n'ai jamais combattu que pour moi-même, et pourtant, je ne suis qu'une viande s'apprêtant à refroidir sous le regard inattentif des lecteurs du journal de Montréal. «Il laisse dans le deuil deux oeufs tournés avec patates rissolées.»

Dans l'encart publicitaire, je repère les spéciaux de la semaine de l'épicier du quartier. Je découpe la première photo de jambon que je vois. Ma photo nécrologique. Ce ne sera pas pire que ma tête d'aujourd'hui.

vendredi 26 février 2010

Il est parti...

Sur le blogue, je peux corriger, m'expliquer, voire effacer. Mais le livre est un enfant vachement plus autonome. Une fois lancé, le temps est venu de le s'exprimer par lui-même.

Je lui ai mis les mots en bouche, maintenant je me tais pour lui laisser la parole.

Et comme tout parent qui rentre dans son nid déserté, j'essuie une larme, je regarde ma liste de projets jusque là en attente et je me frotte les mains...

I'm back baby.

jeudi 25 février 2010

Ce soir!



C'est ce soir qu'a lieu le lancement!

Je vous attends au Nacho libre
913, rue Beaubien est, Montréal.
(tout près de la plaza et du métro)

À tantôt!

samedi 13 février 2010

Un jour tu verras, Cendrillon...

Un de mes rôles en tant que parent est de faire en sorte que mes enfants soient préparés à la vie. Mais comment faire comprendre à ma fille de 3 ans et demi qu'un jour, Cendrillon vieillira, qu'elle sera ménopausée, qu'elle ne marchera pas toujours sur la pointe des pieds, les paumes parallèles au sol? En cette ère commanditée par Disney, où tout ce qui est destiné aux fillettes arbore une princesse improbable aux valeurs amoureuses médiévales et sur qui le temps n'a pas d'emprise, en cette ère, dis-je, cette tâche est difficile et ingrate.

Sauf si Oral B s'en mêle...

mercredi 10 février 2010

Fol Allié

Le roman Fol Allié, de mon ami Patrick Dion, arrive sur les tablettes des librairies (et sur celle de ma bibliothèque) la semaine prochaine. Pour nous mettre l'eau à la bouche, il nous présente aujourd'hui la bande-annonce de son livre. Ça vaut le détour!




Voilà du beau travail artistique et technique.

Après ça, plus d'excuses : la semaine prochaine, courez chez le libraire!

samedi 6 février 2010

J'écris parce que je chante mal - Le Lancement


Il est beau, il est rouge, il est...

J'écris parce que je chante mal !

Les meilleures nouvelles de ce blogue (retravaillées et améliorées, main dans la main avec mon directeur littéraire) y côtoient quelques nouvelles venant d'ailleurs (et de plus loin encore).

Or ainsi donc, il me fait plaisir de vous inviter au lancement, le jeudi 25 février prochain dès 17h
au Nacho Libre (913, Beaubien est, près de la plaza, en biais de la SAQ, à Montréal).

Je vous préviens, il y a des posters de lutteurs mexicains sur les murs, quelques chaises troquées pour des balançoires et... de la bonne humeur !

On s'y voit!

Bien sûr, vous pouvez y amener des amis !

P.-S. Afin de prévoir la quantité de guacamole (et accessoirement avoir une idée de la quantité de livres à y apporter),
ou directement à moi par simple réponse à ce billet (je transmettrai l'info à Septentrion.

P.P.-S. Le livre sera disponible en librairie dès le 23 février.

mardi 2 février 2010

J'écris parce que je chante mal, le livre


Mes amis Facebook le savent déjà.
Les lecteurs de ce blogue savent bien que c'est dans l'air depuis quelque temps...

C'est rouge, c'est beau, c'est bon, et ce n'est pas une Smarties...
J'écris parce que je chante mal, le livre, le recueil de nouvelles, sera en librairie (et en version électronique) le 23 février prochain!



Que des nouvelles - et quelques inédits -, des textes que je retravaille depuis plusieurs mois, main dans la main avec mon directeur littéraire, Éric Simard de Septentrion.

Vous pouvez feuilleter les 20 premières pages ici (l'icône du centre sous l'image du livre).

D'ici quelques jours, je vous reviens avec une date et un lieu de lancement.

Je vous tiens au courant, sûr, sûr. J'espère alors avoir la chance de vous voir la bette!



Un merci tout spécial à Steve Spazuk pour la couverture.

samedi 30 janvier 2010

Petits Coups

Ce matin, dès l'aube, il frappait la tige de fer avec une pierre. Trois coups, arrêt, silence. Il écoutait, sa seule main encore valide sur la tige. Puis il recommençait. Trois coups. Il frappait la tige comme il l'a fait hier matin, et le jour d'avant, et le jour avant celui d'avant. Hier, et les jours précédents, après ses trois coups, il creusait les décombres avec des bouts de planches, il lançait plus loin, toujours d'une seule main, des morceaux de ce qui était sa maison.


Mais ce matin, il n'a pas creusé. Il a continué de frapper ses trois coups, d'écouter. Parce que ce matin, sa femme, à moins que ce fut sa fille? ne lui faisait plus écho de sous le tas de ciment qu'est maintenant sa maison. Les décombres ne l'appelaient plus à l'aide, ne lui disaient plus «je t'aime» à petits coups assourdis.


Après quelques heures, peut-être plus, l'homme a lâché sa pierre qui a roulé quelques mètres plus bas. En regardant sa main écrasée, ses doigts inutilisables, il s'est dit qu'il devait maintenant s'en occuper. Sans compter qu'il commençait à faire drôlement faim.


Sur le chemin du village, il a bien croisé quelques personnes, des gens qu'il ne reconnaissait pas, dont quelques Blancs. Il ne se rappelait pas de la dernière fois où il avait vu un Blanc dans son village. Et c'est seulement quand l'un d'entre eux, habillé d'une blouse blanche, lui a dit qu'il devra lui amputer la main que l'homme s'est mis à pleurer.

mercredi 13 janvier 2010

Haïti

Ce n'était déjà pas la joie tous les jours...
Aujourd'hui, en Haïti, c'est ni plus ni moins l'enfer.
Et plus les heures passent, pire c'est.

Ce qui s'y passe présentement me laisse sans voix, sans mots, abasourdi.

Ici, depuis notre coin paisible du monde, nous ne pouvons faire grand chose mais notre seule compassion n'est pas suffisante.

Mon appel est simple et se doit d'être répété : Donnons.

Donnons à la mesure de nos moyens - qui sont immenses comparés aux leurs.

Donnons à des organismes établis, qui connaissent déjà Haïti et les Haïtiens, pour que notre argent se rende là-bas, qu'il aide le plus de gens possible. J'en fais une liste incomplète ci-bas. Cliquez sur celui de votre choix. Il ne vous reste plus qu'à sortir votre carte de crédit.

Et à mes amis haïtiens, à Marie-Gyslène et à Marie-Denise, entre autres, qui ont de la famille là-bas, je dis courage.











mardi 12 janvier 2010

L'invité (dernière partie)

Le voleur était couché sur mon divan. Les yeux mi-clos, un bras sur le front, l’autre tombant vers le plancher. Il m’a à peine regardé avant de refermer les yeux et d’articuler lentement, le plus sérieusement du monde :

- T’es vraiment superbe, Naked Lunch.

C’était Frédérique. Elle était à moitié saoule et aux trois quarts ivre. La pièce embaumait tellement le Jack Daniel’s qu’il aurait été dangereux de craquer une allumette.

- C’est super gentil la raquette, mais j... j’suis pas intéressée à jouer au badminton… Pas... Pas ce soir en tout cas… Et arrête de sacrer… Ça te va pas...

- Fred?! T’es hyper conne d’entrer sans me prévenir!!! Tu réalises que j’aurais pu te tuer!! ai-je lancé en me redressant.

Frédérique a soulevé son avant-bras, m’a regardé les yeux mi-clos, a soupiré puis s’est recalée au creux du divan :

- Avec quoi? Ta raquette?

Pour rire, elle a eu un gloussement unique qu’elle a étouffé dans un profond bâillement éthylique.

- Come on… J’… J’étais juste trop saoule pour aller me coucher chez-moi, a-t-elle lentement articulé. P’is… P’is t’as juste à barrer ta porte… Y’a des malades dehors… Un jour, c'est un voleur qui entrera… Un voleur... Ou pire.

Fred s’est endormie sur ce message de sécurité publique. Pendant que je lui cherchais des couvertures propres, je me suis dit qu’il vaudrait quand même mieux que je prenne l'habitude de verrouiller la porte la nuit. Je suis allé à la porte d’entrée. La lumière de la pleine lune entrait par la fenêtre sans rideau. Dehors, pas un chat. J’ai soupiré. Montréal n’est jamais plus belle que la nuit. J’ai essayé de tourner le loquet de la serrure, mais la rouille, la peinture et des années d'inutilisation m'en ont empêché. J'ai soupiré et je suis retourné au lit.

J’ai regardé le vide une bonne heure, le temps que mon adrénaline se dilue et que revienne le sommeil. Les yeux au plafond, j’ai pris la décision d’abandonner le badminton et de m’inscrire dès que possible à des cours de golf.

lundi 11 janvier 2010

L'invité (3e partie)

Je me suis avancé vers la noirceur du salon et ce n’est que plusieurs pas plus loin que je me suis rendu compte que je tenais à deux mains une raquette de badminton. Pourquoi ne jouais-je pas à la balle molle ou au golf comme tout le monde? Dans les cas d’intrusion par effraction, le pouvoir de dissuasion d’un fer 3 n’a jamais été remis en doute. Comme je ne pouvais demander au brigand d’attendre le temps que je me trouve une arme digne de cette appellation, j’ai poursuivi mon approche du salon en prenant soin d’ajouter cent kilos à chacun de mes pas. Puis, d’une voix qui a mis une syllabe à s’aggraver, j’ai lancé:

- À ta place, le cave, je partirais tout de suite. Je suis armé...

La menace de l’arme auto-défensive. Voilà. Je n’étais pas mieux qu'Ahmadinejad du haut de son fauteuil présidentiel. À mon invective j’ai eu pour seule réponse un grognement abruti. Iranien ou pas, j’étais nu, armé d’une matraque à moineaux en carbone ultraléger, et je devais affronter un adversaire invisible, inconnu, qui s’exprimait comme un homo erectus. Pourquoi à moi? ai-je murmuré en regardant le plafond. Je me devais d’attaquer rapidement, profiter de l’effet de surprise pendant que l’intrus croyait encore que je pesais deux cent kilos. J’ai pris mon courage à bras-le-corps, j’ai fait deux ou trois pas éléphantesques de plus et, dans une motion à mi-chemin entre celle du Batman des années soixante et celle de Jackie Chan des années 90, j’ai allumé la lumière et j’ai bondi dans le salon en feignant un kata improbable et en poussant ce qui se voulait un cri de guerre barbare. En moins d'un dixième de seconde, j’ai scanné le ring que s’apprêtait à devenir mon salon. Aussi intimidant que l’inspecteur Cluso. Parfaitement ridicule.

- Mon tab…

Ma phrase s’est étouffée là. Il était inutile de blasphémer plus loin.

vendredi 8 janvier 2010

L'invité (2e partie)

Des pas qui se voulaient discrets se sont dirigés vers le salon, puis plus rien. J’ai fait un rapide bilan qui n’avait rien de rassurant : il y avait un intrus, un voleur, voire un terroriste dans mon appartement, j’habitais seul depuis plus d’un an et j’avais autant de talent pour les arts martiaux qu’un Teletubbies. Rien de tout cela n'offrait de résistance substantielle à l'inquiétude qui me gagnait.

Pour entrer si tard et si bruyamment chez les gens alors qu’ils dorment, le terroriste devait être hardi. Ou drogué. Ou les deux, en plus d'être affligé d'une légère débilité mentale qui lui voilait tout espoir d'empathie, et il devait sûrement posséder la musculature d'un King Kong. Comme il était sans doute venu pour se faire un petit système audio facile, je ne tarderais pas à entendre mon équipement électronique tomber dans une grande poche de hockey... Mais malgré une écoute digne des meilleures antennes de la NASA, je n'entendais plus de bruit. Rien. Niet. Aucun son, que du silence. J’ai attendu encore un peu avant de respirer. Le voleur semblait s’être évanoui. J’ai hésité sur la marche à suivre : devais-je faire le sourd? Le mort? L'endormi ou le redresseur de tort?

Bien qu’elle était de loin la moins agréable, la dernière option m’a semblé la seule valide. J’ai décidé d’aller voir, en essayant de ne pas penser aux conséquences possibles de mon geste. J’étais aussi nu que j’en étais capable, et je suis capable de beaucoup quand on parle de nudité. Mon coeur battait dans mes lobes d’oreilles. Avant de sortir de ma chambre, j’ai pris le premier objet, la première arme qui m’est tombée sous la main.